Cliché désignait la technique d'impression correspondante d'après le terme français signifiant "copie" et non le cliché en tant que stéréotype, même si les illustrations étaient parfois proches du cliché.
Dans le livre de clichés de la Mission de Bâle, on trouve également cette image intitulée "Häuptling auf dem Paradebett - Neuseeland". On y voit un homme assis, entouré de divers ustensiles, d'os et de têtes coupées ainsi que d'un totem.
À l'époque baroque, un lit de parade était le lit de réception cérémonial d'un souverain ; par exemple de Louis XIV ou de Marie-Thérèse. Ceux-ci devaient être plus somptueusement meublés que celui du chef maori.
Mais un lit de parade désignait également un échafaudage permettant d'exposer publiquement le corps d'une personne de haut rang. Et en effet : dans le "Calwer historisches Bilderbuch der Welt" de 1883, le même cliché est reproduit, à l'envers et avec un autre titre : "Chef mourant, entouré des crânes de ses ennemis abattus".
Ce n'est donc pas un chef de tribu qui est représenté ici dans l'attente de recevoir des invités avec bienveillance, mais un homme face à sa mort. Le totem indique qu'il ne s'agit pas d'un chrétien. Les ustensiles des batailles passées, comme le bouclier et l'épée, ont été déposés et sont suspendus à une clôture.
Les os et les crânes symbolisent le fait que ce chef était un cannibale. Il est entouré des têtes empalées de ses anciens ennemis. Elles lui rappellent peut-être les batailles passées, mais aussi l'inutilité de sa vie. Il a tué tant de gens, mais à quoi bon ? Aujourd'hui, il est lui-même sur le point de les suivre dans la mort.
C'est aussi le message de ce cliché : face à la mort, réfléchir à sa vie, la juger bonne ou la regretter. Même si l'on doit regarder dans les yeux de ceux à qui l'on a fait du mal.
Texte : Patrick Moser, historien et collaborateur scientifique aux archives de Mission 21
